CROIRE À LA FUITE UTILE DES JOURS
Comment ne pas faire une page sur les potagers rencontrés. C’est impossible, alors voilà :

Et une mention spéciale pour le dernier né à Brassy, quelques mois d’existence seulement mais déjà une sacrée envie de pousser, de prospérer dans un désordre apparent nécessaire pour que les plantes se protègent entre elles, sans entrants chimiques. Ici, nous sommes chez des écolos, bios, végétariens et on ne rigole pas avec ça ! Et ils ont bien raison.
J’adore les potagers. A chaque fois, j’ai l’impression d’assister à un grand événement fondamental, celui de la vie d’une graine qui va produire des fruits et des légumes à manger. Nourriture terrestre indispensable pour que surgisse ensuite la culture intellectuelle avec l’histoire des hommes, des traditions, des arts…
Cultiver la terre, c’est l’Art premier. Sans lui, rien n’existerait.
Je me souviens du sujet d’une dissertation à propos du poème le semeur de Victor Hugo. On attendait des élèves qu’ils fassent l’analogie avec la semeuse d’idées, telle que montrée par le frontispice (illustration qui figure au regard d’un titre de livre) du dictionnaire le Nouveau Larousse Illustré : une femme soufflant sur une fleur de pissenlit. Mais je n’avais vu dans ce geste du semeur que la confiance en l’avenir, croire que le futur apportera des fruits de la graine semée. Bizarrement, quelques années après, j’avais eu, aux sortirs des hivers, une sourde angoisse : et si le printemps ne revenait pas, si la magie de la nature n’opérait plus…
Quelques décennies après, pour faire de d’argent, les graines ne germent plus, certains veulent s’approprier la nature universelle pour la vendre ensuite au prix fort. Honte à eux et surtout restons vigilant.
Et tiens, cadeau, le poème de Victor Hugo, en espérant que ce calme (enfin avec le bruit des tracteurs maintenant) nous sera toujours accessible :
Saison des semailles. Le soir. Victor Hugo (1802-1885)
C’est le moment crépusculaire.
J’admire, assis sous un portail,
Ce reste de jour dont s’éclaire
La dernière heure du travail.
Dans les terres, de nuit baignées,
Je contemple, ému, les haillons
D’un vieillard qui jette à poignées
La moisson future aux sillons.
Sa haute silhouette noire
Domine les profonds labours.
On sent à quel point il doit croire
A la fuite utile des jours.
Il marche dans la plaine immense,
Va, vient, lance la graine au loin,
Rouvre sa main, et recommence,
Et je médite, obscur témoin,
Pendant que, déployant ses voiles,
L’ombre, où se mêle une rumeur,
Semble élargir jusqu’aux étoiles
Le geste auguste du semeur.
Le titre de cette page n’est donc pas de moi 😉
Lire la suite : Dieppe, le retour